vendredi 31 août 2012

étape 35 : SAINT-JEAN-PIED-DE-PORT - RONCESVALLES - 27 km

dimanche 27 mai 2012


  Au menu de ce dimanche : 27 km, mais quels kilomètres ! à l'attaque des Pyrénées, rien de moins. Et si ce n'est pas vraiment une attaque, c'est en tout cas une vraie montée : 10 % en moyenne sur les huit premiers kilomètres. De quoi en inquiéter plus d'un.

  Dès potron-minet, des pèlerins isolés ou en groupuscules quittent Saint-Jean-Pied-de-Port par la rue d'Espagne jusqu'aux remparts pour emprunter ensuite la route Saint-Michel en une lente procession. Les articulations sont encore engourdies et la côte cueille le pèlerin dès la sortie des gîtes. Fort de mes 900 kilomètres déjà parcourus et de l'endurance acquise, j'aborde la montée sereinement, marchant à petits pas réguliers pour ne pas forcer sur les jambes, le corps légèrement fléchi sur l'avant ce qui facilite grandement le déplacement en montée avec une charge dans le dos. Le temps s'annonce splendide et je choisis donc de prendre le chemin par la montagne, réputé plus agréable que celui par la route, tout comme la quasi totalité des autres pèlerins.

  A mesure que j'avance, je m'émerveille de la splendeur des paysages où disparaissent très vite les arbustes pour laisser place à une lande très rase, maigre nourriture pour des petits troupeaux de brebis qui tiennent du chamois question équilibre. Ce ne sont que grosses bulles de terre que l'on devine âpres en hiver, lorsque le vent balaie la neige. Aujourd'hui, j'assiste plutôt à un festival de lumières et d'ombres changeantes au gré de la montée du soleil. Le vert et le bleu se partagent le décor dans lequel progresse lentement un long serpentin d'humains, fourmis dérisoires à l'échelle du lieu. Je croise un premier refuge au bout de 4 km (certains y passeront la nuit, trop fatigués pour continuer), puis un véhicule d'une association jacquaire qui distribue des boissons et comptabilise les pèlerins par nationalité, puis encore un refuge au bout de la montée.

  J'aimerais bien voir le col de Roncevaux, moi. Enfant, j'imaginais que franchir une montagne par un col consistait à monter jusqu'au point le plus haut du chemin puis à redescendre de l'autre côté ; voilà, la montagne était franchie. En réalité, et surtout pour les vieilles montagnes comme les Pyrénées, l'élévation n'est pas importante (moins de 1 500 m) mais les montées et les descentes se succèdent sur plusieurs jours, tant et si bien que sans panneau indicateur, on est bien en peine de savoir où se trouve le col. En conséquence, je suis sûr de l'avoir passé, mais où ? Je l'ignore et tant pis. Après une descente euphorisante à travers les bois, sur le versant espagnol de la montagne, je débouche à Roncesvalles (Roncevaux) en début d'après-midi.

  Blotti dans un repli de la montagne, Roncesvalles n'est pas une ville, ni même un village, juste une grande abbaye très chargée d'Histoire à laquelle se sont accolés deux hôtels et deux auberges avec quelques dépendances. La réputation de son dortoir était assez sinistre avec ses 400 lits à trois niveaux, répartis en quelques grandes chambrées. Suite à la rénovation par la Région en 2011, les locaux ont été scindés en boxes de 4 lits avec placards à consigne, sanitaires impeccables en quantité et lieux de vie souverains. A n'en pas douter, un des plus beaux hébergements du chemin.

  A 18 h, la cloche de la chapelle sonne le rappel des pèlerins dont beaucoup se sont endimanchés pour se rendre à l'office en traversant la cour de la collégiale. J'y trouve un petit côté théâtral, comme le signe de la représentation sociale encore vivante chez beaucoup de ceux qui viennent de débuter le pèlerinage.

  Avec le franchissement des Pyrénées, j'ai basculé dans un autre chemin. Je ne suis plus en France même si ce n'est pas encore perceptible et surtout il y a beaucoup de monde ; c'est la foule à Roncevaux avec ses centaines de pèlerins. La solitude est finie et je me demande comment je vais vivre la vie dans les grands dortoirs, moi qui suis plutôt solitaire et aime mon confort...En attendant les réponses à ces questions peu métaphysiques, je dis au revoir à la via Lemovicencis et bienvenue sur le Camino Francés !


nb : vidéos tournées en 1080p ; si chargement trop lent en plein écran, passer en 720p ou 480p 



nb : cliquer sur les images pour les agrandir
















3 commentaires:

  1. Bonjour !
    je lis avec intérêt vos notes de marche. Je suis sur la voie de Vézelay, que je reprends à Périgueux en mai prochain, après avoir été hospitalière à La Coquille durant 15 jours en avril.
    Je me demande bien comment on vit cet afflux de pélerin, près la relative solitude de la voie de Vézelay .....
    merci du partage
    Béatrice

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    1. désolé de ne pas avoir répondu plus tôt mais j'avais laissé tomber un peu ce blog.
      avez-vous pu reprendre votre parcours en mai ?
      Et pour savoir comment on vit l'afflux de pèlerins, rien de tel que de s'y confronter avec ses propres attentes et sa personnalité, je pense.

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  2. Magnifique reportage que de souvenirs .
    Je suis aussi Hospitalier sur le chemin de Vézelay .
    Vous pouvez voir mes vidéos sur YouTube (gerard hophra)

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